Sylviane Bulteau, vous connaissez ? Non ? Vous devriez ! Sylviane Bulteau est députée de la Vendée, ainsi que Conseillère générale et première secrétaire fédérale du Parti Socialiste de Vendée. Elle est assez connectée, puisqu'elle dispose d'
un blog, d'un compte
Facebook et de
Twitter. Vous direz, elle peut bien se payer tout ça, avec ce qu'elle gagne en tant que députée ! Vous auriez raison !
Mais pourquoi faudrait-il la connaitre ? A t-elle trouvé le moyen de permettre à Hollande de tenir sa promesse d'inversion de la courbe du chômage ? A t-elle coaché Valls et Cazeneuve pour faire baisser l'insécurité en France ? A t-elle convaincu Andrieux, Emmanueli, Thévenoud, Balkany, et autres de bien vouloir renoncer à leur siège à l'Assemblée Nationale ? A t-elle volontairement mis en oeuvre la promesse numéro 48 du candidat Hollande concernant le cumul des mandats ?
Rien de tout ça, rassurez-vous !
Non, Sylviane Bulteau est juste, dans le cadre de sa mission de législateur et de contrôleur de l'action du gouvernement, à l'origine d'une question à Bercy totalement hallucinante.
La Voici.
Mme Sylviane Bulteau interroge M. le ministre des finances et des comptes publics sur la concurrence que constituent certains sites d'annonces gratuites, notamment pour les professionnels de l'immobilier qui considèrent que celle-ci s'exerce de façon tout à fait déloyale, et même au détriment de l'État, en laissant s'installer un marché parallèle de l'immobilier. En effet, lorsqu'une transaction immobilière est réalisée par l'intermédiaire d'un professionnel, ce dernier pratique des honoraires qui sont assujettis à l'impôt (TVA). Ce qui n'est naturellement pas le cas dans le cadre d'un arrangement entre particuliers. Le principal site internet d'annonces gratuites en France, accessible sans inscription préalable, propose environ 260 000 annonces. Si l'on considère une somme moyenne de 6 000 euros HT sur ces transactions, à laquelle on applique 20 % de TVA, on obtient 312 millions d'euros environ de manque à gagner pour l'État. La vente de particuliers à particuliers s'est donc indéniablement « professionnalisée » grâce aux nouvelles technologies. Aussi, elle lui demande quelle est la position du Gouvernement à ce sujet et s'il envisage de réglementer ces nouveaux usages.
Est-ce que vous avez lu ce que demande la députée socialiste ? Elle se plaint du fait que PAP ou Le Bon Coin 1. existent 2. "enlèvent du travail" aux agents immobiliers 3. induisent un préjudice pour l'Etat qui aurait dû toucher plus de taxes !
On rêve ! Mais non, c'est la vérité, Sylviane Bulteau est une vraie personne, pas juste un troll sur Internet chargée de caricaturer la gauche socialiste. C'est une vraie députée, payée avec des vrais impôts pour pondre des trucs pareils.
On peut adopter deux postures : soit se dire que c'est n'importe quoi, et qu'en fait Sylviane Bulteau est payée par la FNAIM, Century 21 ou autre pour casser PAP, le Bon Coin et ces vilains citoyens qui commercent entre eux directement sur le net, les méchants ! Dans ce cas, ce serait un coup de lobbying à l'ancienne. Après tout, c'est de bonne guerre, Foncia (Banques Populaires), Arthur Optimist (Caisses d'Epargne), Square Habitat (Crédit Agricole) et autres ont l'oreille des politiciens, pourquoi n'en profiteraient-ils pas ? Cette hypothèse pourrait être limite, elle est donc très peu probable.
Soit on se dit que Sylviane Bulteau croit en ce qu'elle raconte, et alors là, les implications idéologiques sous jacentes sont impressionnantes. Déjà, cela voudrait dire que, pour les gens comme Sylviane Bulteau, jamais les solutions décentralisées ne seront préférables. Vous comprenez pourquoi, dans un monde capitaliste à défaut d'être également libéral, le Parti Socialiste et ses affidés (syndicats, Libération, etc ...) préfèrent,
in fine, traiter avec les grandes entreprises, adorent la macro économie et se méfient des PME ? L'attachement au
capitalisme de connivence et aux rentes de situations établies vient de là : le PS (mais aussi les socialistes de droite) ne veut pas tenir compte des individus, il veut des grandes masses (les consommateurs, les entreprises, l'Etat...) modélisables par Bercy.
Ensuite, cela signifierait que dans le monde idéal de Sylviane Bulteau, l'Etat, c'est 100% du PIB, sauf exception, et non pas l'inverse. L'inverse, c'est évidemment, chacun agit de manière décentralisée, sauf si les citoyens s'accordent à financer en commun, par l’impôt, des services publics tels que l'armée, la diplomatie, la police et la justice.
Les socialistes en sont là : traquer des "manques à gagner pour l'Etat". Un peu comme la personne qui vous explique que le gazole bénéficie d'un avantage, d'une détaxe, par rapport à l'essence, alors qu'il est en réalité juste un peu moins taxé.
Ce qui est terrible, dans cette question au gouvernement, c'est qu'elle reflète le décalage entre les législateurs et la réalité. Voila une personne dont on aurait éventuellement pu se dire qu'elle était plus en phase avec la réalité que des gens d'une génération au dessus, type Juppé, Hollande ou Bayrou. Mais non. C'est le même aveuglement face aux conséquences positives de cette contestation de la verticalité, que le développement de l'Internet permet.
Les agents immobiliers, voilà typiquement un métier de marché, dont la valeur ajoutée réside dans la qualité du conseil et de l'assistance au client. Si les gens préfèrent échanger directement plutôt que de passer par des agents immobiliers, peut être est ce parce qu'ils estiment que la qualité de leur aide,parfois, ne vaut pas les honoraires qu'ils facturent, ou qu'ils estiment pouvoir faire mieux pour moins cher ! (A leurs risques et périls, d'ailleurs, vu la complexification de l'acte d'achat rendue possible par la loi ALUR de Cécile Duflot).
Sylviane Bulteau a juste oublié que la base taxable n'est plus une matière stable, inerte. le monde bouge, il change ! Ce qu'elle appelle
marché parallèle de l'immobilier ne correspond même pas à une volonté de frauder. C'est juste le développement d'une nouvelle réponse à un besoin, celui de trouver des logements. Sylviane Bulteau et ses amis paniquent parce que le gouvernement a réussi à démontrer l'existence de la
courbe de Laffer : trop impôts a tué l’impôt. Ils devraient aussi s'inquiéter du fait que leur logiciel a sérieusement besoin d'être mis à jour, afin d'intégrer les paramètres tels que : processus de destruction créatrice de Schumpeter et
liberté de choix du consommateur, qui peut préférer les agences immobilières ou Internet.
Ah oui mais alors, comment on finance le budget de l'Etat, répondront les socialistes ? Qu'ils commencent par regarder si, en ces temps de déficit, 4 guerres en cours sont bien raisonnables, ou bien si nous avons les moyens d'avoir autant de profs pour des résultats scolaires si catastrophiques. En cherchant bien, ils trouveront de quoi économiser. Ils n'ont qu'à commencer par le rapport de la Cour des Comptes.