lundi 12 octobre 2015

Cheyenne Caron, ou l'impossibilité de sortir de la matrice

Quand on lit certains faits divers, on ne peut que se dire qu'on vit dans un pays de fous formidable.
Tenez, prenez le conflit qui oppose le CNC à Cheyenne-Marie Carron. Le CN quoi ? Cheyenne qui ? 

Cheyenne Carron
Le Centre National du Cinéma (CNC), vous connaissez. Il s'agit de cet organisme, dont, en 2011, l'inspection des finances (pas des anti étatistes, donc) estimait qu'il "avait trop d'argent" (1), et qui supervise l'ensemble du cinéma français.  Le budget du CNC est alimenté par des taxes spécifiques touchant le secteur de l'audiovisuel :
  • Taxe Spéciale Additionnelle prélevée à hauteur de 10,72% sur le prix des places de cinéma
  • Taxe sur les éditeurs et les distributeurs de services de télévision,
  • Taxe sur la vidéo physique et la vidéo à la demande
Autrement dit, tout spectateur de film, ou tout consommateur de services connexes à la TV contribue à faire fonctionner le CNC. Ce dernier se voit doté de diverses missions, dont celle de faire respecter la chronologie des médias (2) 
Quand à Cheyenne-Marie Carron, si vous n'êtes ni un lecteur de la presse qui n'est pas Charlie (Nouvelles de France, Islamisme.fr, B. Voltaire ...) ni un expert en films traitant de la religion (3), et de la chrétienté notamment (4), son existence et celle de ses oeuvres cinématographiques (cinq films) a pu vous échapper. 

Pourtant, ce que vit cette cinéaste est instructif, pour ne pas dire édifiant. Pour son dernier film comme pour les précédents, Cheyenne Carron s'est vu refuser une subvention du CNC. Jusque la, à la rigueur, on se dit que ça n'est pas grave, puisque Cheyenne Carron a mis en oeuvre son plan de se financer par le mécénat (5). Comme dans le cas emblématique de Kung Fury (6), on voit que la création artistique peut passer par d'autres circuits que le financement institutionnel classique. Mais les problèmes de Cheyenne Carron ne se sont pas arrêtés la. 
Après le financement et la réalisation, il a bien fallu distribuer le film. Et la, la dernière œuvre de Cheyenne Carron s'est heurtée aux limites de l'esprit Charlie. En France, en 2015, la liberté d'expression est acquise, dans les limites du "vivre ensemble". L’Apôtre, le film de Cheyenne Carron que le CNC avait refusé de subventionner, n'y voyant sans doute pas d'intérêt (malgré la mission du CNC de promouvoir le cinéma français dans toute sa diversité) a été interdit de distribution, car il risquait de porter atteinte à l'ordre public. De quoi parle ce film ? D'ultra libéraux mangeurs de chatons ? De pédonazis appelant à assassiner le président Hollande ? Non. Même pas. Il s'agit simplement d'une fiction dans laquelle un "musulman d'apparence", comme disait Sarkozy, se converti au catholicisme et est confronté à des réactions diverses de la part de son entourage.





Voila un sujet qui menace donc l'ordre public en France en 2015. Est-ce parce que, aussi minoritaire puisse être cette expérience, on, sait qu'elle existe, ici comme ailleurs (7) ? 

Mais les problèmes ne se sont pas arrêtés la pour la cinéaste. Puisque le CNC n'a pas voulu subventionner son film, et puisque diffuser un film au Lincoln (Champs Elysées) ou au Village (Neuilly sur Seine) peut porter atteinte à l'ordre public, Cheyenne Carron a décidé de vendre son film sous forme de DVD, ce qui n'est pas permis avant plusieurs mois par la règle de la chronologie des médias. Il faut attendre au minimum 4 mois entre la date de sortie du film et sa mise à disposition sous forme de DVD. 

Du coup, le CNC cherche à poursuivre Cheyenne Carron. 




Question : est-il logique que le CNC se permette de superviser la vie d'un film qui est déjà totalement hors circuit et qui n'a pas couté un seul euro d'argent public ? 

http://www.christianophobie.fr/la-une/lapotre-le-film-attendu-desormais-en-dvd#.Vhto2ZdmrYQ
Pourquoi, sur la forme aussi bien que sur le fond, s'acharner sur l’Apôtre et sur sa réalisatrice, sachant qu'ils sont complétement en marge des institutions culturelles ? Est-ce pour envoyer un signal aux outsiders, ou est-ce le sujet traité qui est en cause (à moins qu'il s'agisse des deux ?). 
Question subsidiaire : qui contrôle le CNC, cette institution totalement hors de contrôle et qui refuse jusqu'à l'idée d'appliquer les recommandations de l'Etat en matière immobilière (8)? 
Enfin, quand bien même le CNC serait désireux de faire taire celle qui'il doit probablement considérer comme une cinéaste d'extrême droite, ne pourrait-on pas rappeler que la liberté d'expression ne vaut pas que pour les idées et concepts qui nous plaisent (10)

Il s'agit moins de brider le champ d'action de cette autorité administrative indépendante que d'éviter qu'ils donnent raison a posteriori à l'ennemi public numéro un, Dieudonné, dont la stratégie de victimisation découle du comportement du CNC (11), ne l'oublions pas. 


(2) Wikipedia Chronologie des Medias
(3) Le blog cinéphagemaniac L'apotre, de Cheyenne Carron 20 février 2015
(4) L'Obs Rue 89 Des films cathos retrouvent le chemin des salles, grâce à des mécènes 30 juin 2014
(5) Liberation La phrase de Cheyenne Carron
(6) H16 Du kung-fu, des dinosaures, des Valkyries ? Une autre façon de faire des films 17 mai 2017
(7) Aleteia Maroc : La conversion de musulmans au christianisme soulève la colère dans le pay 30 mars 2015
(8) BFM Business
(9) Le CNC ne veut pas quitter les beaux quartiers de Paris 1 septembre 2014
(10) Génération Libre Pour rétablir la liberté d'expression
(11) Grioo.com Film sur le "Code Noir": Dieudonné s'exprime 17 septembre 2004

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