Le sujet était "quelles solutions pour une société apaisée ?". Vaste sujet.
Commençons par les mots, quelles solutions pour une
société apaisée ? La France est-elle une société ? Un Etat et une Nation, certainement, mais une société ? Admettons que les Centristes et Rost ne soient pas trop Thatcheriens (remember, "
there is no such thing as society") et qu'ils pensent qu'ils suffit que nous soyons plusieurs à se rassembler sous la bannière bleu blanc rouge pour etre une "société".
Jean-Christophe Lagarde a commencé par présenter son parcours, sa vision et sa méthode. En terme de parcours, c'est brillant : il a repris à l'age de 31 ans une mairie gérée depuis 70 ans par les kamarad communistes. En terme de vision, c'est intéressant : il s'agit de commencer à s'occuper des gens et non plus juste des situations. En termes de méthodes, par contre, ca soulève des questions. On oppose souvent Paris 75, où il y aurait tout, à la banlieue dont notamment la Seine Saint Denis, où il faudrait donner plus, afin de faire vivre la devise républicaine, liberté égalité fraternité, et donner corps à la méritocratie républicaine, largement bafouée par la réalité d'inégalités à tous les niveaux. Sans aller completement dans le sens d'une nécessaire politique de discrimination positive, Jean-Christophe Lagarde soutient les ZEP, la loi SRU (les 20% de HLM par commune) etc. Et même si Jean-Christophe Lagarde reconnait que les barrières sont autant dans les têtes des gens que dans les faits, il pense qu'il faut faire plus pour ceux qui ont moins.
Rost a un parcours moins linéaire mais tout aussi interessant. Ancien membre de bandes de zoulous qui se faisaient un plaisir de défier la RATP et le contribuable ou de racketter les blousons Chevignon qui ont fait lla fortune des petits malins du Sentier, il a fini par passer à la musique puis à l'action sociale. Il plaide pour une France où l'administration, et plus spécifiquement la police, la préfecture de Bobigny (93) et l'école seraient plus respectueux des gens et plus en phase avec la "société". Vu de la où on part, ca n'est pas difficile. A ce niveau, d'ailleurs, les libéraux rejoignent à 100% ce que dit Rost :
- le principe de responsabilité n'est pas à sens unique. Si vous ne votez pas, ne vous plaignez pas
- l'administration est souvent autiste, voire étouffe le citoyen
Maintenant, il y a quand même quelques questions, puisqu'il parait qu'en gros, nous vivons dans une "société" pas apaisée du tout parce que l'accès à l'école et au logement sont ultra-inégalitaires.
Commençons par celle du logement, un sujet qui intéresse tous les franciliens. Il parait que la mixité sociale est un objectif souhaitable, et que la loi qui impose 20% de HLM par commune un bon moyen.
On peut douter de tout cela.
Déjà, rappelons qu'en réalité, la mixité sociale, les gens n'en veulent pas. Dans 99.999% des cas, quand une famille habite un quartier qui, pour x raisons, est peu désirable, quand ses moyens financiers s'améliore, elle part. C'est pas juste un truc de français, ca se vérifie partout. La Seine Saint Denis rassemble trop de familles pauvres ? Oui, et alors ? Le tout est de leur donner une chance de mobilité sociale et des opportunités, et non pas plus de moyens pour rester dans le 93. (Au passage, les socialistes, même quand ils ne dépensent pas 3000 dollars pour une nuit d'hotel, habitent rarement les quartiers des gens qu'ils disent défendre, ils préfèrent plutot les petites rues tranquille du VIeme. fermons la parenthèse ...). La mixité sociale version Zola-Balzac-naturalistes du Paris des années 1860, il faut l'oublier.
De plus, quand on parle de HLM et d'aider les gens à accéder au logement, on en vient souvent à la solution du HLM réparti sur tout le territoire, pour éviter que "toutes les difficultés se retrouvent concentrées sur les mêmes portions du pays".
Prenons Drancy. 33% de HLM en 1999. Seulement, Drancy a 66.000 habitants (un peu plus que dans le Veme arr). Sa voisine, Bobigny a 55% de HLM (et 47.000 habitants, comparable au 6eme arr.) La plus grande ville de Seine Saint Denis, Montreuil, a 33% de HLM et 103.000 habitants (un peu plus que le 10eme arr) et l'une des plus petites, l'Ile Saint Denis, 68% de HLM mais seulement 7300 habitants (moins de la moitié du 1er arr).
Questions :
- étant donné les couts fixes inhérents à chaque ville, un tel morcellement du territoire est il logique, ou, autrement dit, les 1200 communes d'Ile de France ont elles un sens ?
- mesurer un taux de HLM à Drancy (66.000 habitants) est ensuite le comparer à celui de Paris (2 millions d'habitants) est-il pertinent ?
L'école, ensuite. Tout le monde qui réfléchit un péu sérieusement est d'accord pour dire que l'école ne peut plus fonctionner en 2011 comme on a revé qu'elle puisse fonctionner en 1885. En revanche, on nous vend souvent la version années 50, qui en donnant un enseignement "républicain", aurait permis de générer des élites méritocratiques. Or, il est toujours un peu difficile de faire des comparaisons avec les années 50 et 60, une période atypique en terme de pyramide des ages et de modèle économique, ces deux éléments ayant un impact sur l'emploi et le chomage. Mesure t-on l'efficacité de l'école par l'insertion professionnelle ou par le niveau de culture générale atteint ? Vaste
débat que vous pourrez
trancher avec Dr Friederike Sözen (Chambre de Commerce et d'Industrie de Wien), Nelly Guet (Alternative Libérale) et Martin Stevens (entrepreneur britannique) à l'occasion du débat "L'éducation et l'Economie" - une conférence organisée par de l'Institut Turgot, mais la où tout le monde se rejoint, c'est pour dire à quel point l'école Républicaine est une fiction qui aboutit à ce qu'à Polytechnique, un élève sur deux a un parent prof. Question : pourquoi continuer, en tant que contribuable, à payer pour ça ? le salaire d'embauche des Polytechniciens étant de 41.780 euros en moyenne en 2009, (source : Polytechnique), ne pourraient-ils pas payer pour leur éducation supérieure ?
Malgré ces remarques, le Nouveau Centre fait bien d'ouvrir le débat de l'inégalité des chances en France et il a l'enorme mérite de poser les questions pendant que d'autres gardent la tête dans le sable. Réduire les inégalités, ca parait difficile, mais si déjà les citoyens et les étrangers résidents avaient l'impression que nous étions tous égaux devant la loi, et qu'en dépit des inégalités, nous avions tous une chance (opportunités équitables) alors on se dirigerait très certainement vers une société apaisée. Ca tombe bien, moins et mieux d'Etat, ce sont les valeurs que les libéraux partagent et mettent en avant. Et les opportunités émergeront quand le dynamisme retrouvé de l'économie decrispera la situation des gens accrochés à leurs privilèges, ce qui est rationnel de leur part. Dans un pays où quand l'Etat dépense 1 euro, il en emprunte quasiment 40 cents. Il n'y aura pas plus d'Etat. Ca tombe "bien" parce que cet Euro est de toutes façons actuellement dépensé sur des postes qui en réalité renforcent les inégalités existantes, à commencer par l'Education. Le Moins d'Etat permettra donc de faire plus de social, paradoxalement.