vendredi 30 janvier 2015

Claude Bartolone : valeurs à géométrie variable ?

Un jury de sept journalistes politiques a  décidé d'accorder à Steeve Briois le prix "d'élu local de l'année" (1). Que des journalistes politiques préfèrent attribuer des prix à des élus (vive l'entre-soi !) plutôt que d'informer le public sur les suites de l'audition de Valérie Trierweiler le 15 décembre dernier (2), analyser l'usage élu par élu de leur indemnité forfaitaire de représentation (IRFM) ou détailler la liste des villes qui ont emprunté en francs suisses, passons. 

Steeve Briois, c'est qui ? C'est un Ch'ti de 42 ans, gay selon Libération (3) ou Yagg (4), maire de la ville d'Hénin-Beaumont depuis 2014 et député européen élu aux élections européennes de juin 2014. C'est aussi et surtout un membre du Front National. En tant qu'élu, Briois n'est donc, a priori, ni plus ni moins méprisable que les autres élus, surtout en comparaison de ceux condamnés par la justice mais qui continuent à siéger à l'Assemblée Nationale, comme Sylvie Andrieux (5).
Les journalistes politiques ont récompensé Briois afin de saluer le travail d'implantation locale effectué par le parti d'extrême droite.  

Ce prix, apparemment, il ne fait pas l'unanimité : 


Mais c'est surtout Claude Bartolone, le président de l'Assemblée Nationale, qui s'est fait remarqué. Attention, Claude Bartolone, c'est un modèle ! Il emploie sa femme à l'Assemblée Nationale (6), il cumule plusieurs fonctions (député de la 9e circo. de la Seine-Saint-Denis, président de l'Assemblée nationale, conseiller municipal du Pré-Saint-Gervais et conseiller communautaire), il vote contre l'amendement Courson sur la fiscalisation de l'Indemnité Représentative de Frais de Mandat (I.R.F.M.) , mais qu'est ce que tout cela à coté du fait d'être socialiste ?

Et qu'est ce qu'il a fait, à l'occasion du prix remis à Briois ? C'est simple : Bartolone a refusé d’assister à la remise du prix « d’élu de l’année » de Briois. Pour quel motif ? Parce qu'il "ne me voyais mal partager une coupe de champagne et des petits fours avec le membre d’un parti dont le président d’honneur avait évoqué les chambres à gaz comme étant un point de détail de l’histoire" Pour Claude Bartolone, le FN n'est pas un parti comme les autres. (7).

Cette fidélité de Claude Bartolone aux valeurs de lutte contre le fascisme et ses héritiers, le président de l'Assemblée Nationale pourrait s'en enorgueillir. Hélas, elle tombe doublement à plat. 

D'abord, Claude Bartolone n'est pas cohérent quand il veut à tout prix établir des filiations idéologiques définitives entre les différents membres du FN, liens qu'il n'établit pas pour ses collègues du Parti Socialiste.
Claude Bartolone part du principe que puisque Jean-Marie le Pen est un révisionniste en relativisant l'importance de la shoah, sa fille l'est également. Dans ce cas, pourquoi Claude Bartolone fréquente t-il François Hollande (dont le père était un militant d'extrême droite (8)), Manuel Valls (dont le père s'est accommodé, selon la thèse d'Emmanuel Ratier, du franquisme (9)), François Rebsamen (dont le père aurait été un soldat SS dans la Wehrmacht ! (10)), après ne pas avoir quitté le Parti Socialiste quand le public a appris qui était François Mitterrand, à savoir un militant d'extrême droite, puis un employé de Vichy,  un partisan de l'Algérie Française puis l'ami de Paul Touvier et Maurice Papon ?




Ensuite, les électeurs du  Front National ne se sentent pas redevables de l'héritage de l'extrême droite, pas plus que leurs élus nouvelle génération d'ailleurs. C'est d'ailleurs la même chose au Front de Gauche vis a vis des crimes du communisme.
En revanche, le FN, qui se présente toujours comme le parti anti système et persécuté par l'establishment, gagne des voix et des forces à chaque fois que des gens comme Claude Bartolone se posent en donneurs de leçons.
Ces dernières semaines, un débat idéologique de fond émergeait au sein de l'extrême droite (12) : il opposait Aymeric Chauprade et Marion Maréchal le Pen à Marine le Pen et Florian Philippot. Ce débat, Claude Bartolone l'a fait passer au second plan. Il a aussi permis à Marion Maréchal le Pen de formuler des menaces contre un journaliste, c'est à dire de se faire de la com' à bon compte auprès de son électorat (11).

Bravo Claude Bartolone ! A croire qu'il ne lit pas les sondages !

La lutte contre le Front National pourrait être noble si elle n'était non seulement complètement vaine, mais en plus illogique. Le FN est un parti légal et ses membres, en 2014, n'ont pas participé à la Shoah.  Si Claude Bartolone veut vraiment lutter contre le FN, alors il faut qu'il commence par lutter contre les valeurs nationalistes et socialistes. Problème : alors que le FN est un parti socialiste cohérent, le PS de Bartolone, lui, hésite. Le combat contre le FN (et contre tous les partis socialistes), sur le plan des valeurs et non pas par simples incantations, c'est chez les libéraux que cela se passe. Au protectionnisme que propose le FN, préférons lui l'ouverture que promeut le Parti Libéral Démocrate !



(2) Valeurs Actuelles Valérie Trierweiler au tribunal le 15 décembre 19 novembre 2014
(3) Libération Briois : ah ben c’est gay… 24 mars 2014
(4) Yagg Steeve Briois, le maire gay et FN de Hénin-Beaumont, «élu local de l’année» 28 janvier 2015
(5) Le JDD Condamnation confirmée pour la députée PS Andrieux 23 septembre 2014
(6) Atlantico Claude Bartolone : il embauche sa femme dans son cabinet 25 septembre 2012
(7) BFM TV Claude Bartolone sur le Front national: "ce n'est pas un parti comme les autres " 29 janvier 2015
(8) Le Monde François Hollande avec son père, une opposition sans révolte 22 mai 2012
(9) YouTube Manuel Valls, homme au double visage
(10) Enquête & Débat François Rebsamen a-t-il menti sur son père en prétendant qu’il était résistant ? 12 avril 2014
(11) Atlantico Steeve Briois désigné "élu local de l'année" : Marion Maréchal-Le Pen s'en prend à Gilles Leclerc
(12) Europe 1 Au Front national, une chef mais deux courants 28 novembre 2014

1 commentaire:

  1. Tsipras s'est allié à l'extrême-droite en Grèce, on n'a pas entendu la critique de Bartolone. Dans certaines conditions, on peut donc être national-socialiste (comme Mélenchiasse) et fréquentable.

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