vendredi 28 août 2015

L'Eglise et Sciences po face au FN : pourquoi ce n'est rien

Aujourd'hui, si vous voulez rire, allez voir l'édito de Bruno Roger-Petit publié par Challenges : "L'Eglise et Sciences po face au FN: pourquoi c'est un phénomène inquiétant (1)". 

Ce journaliste, qu'on peut sans l'insulter qualifier d'éditocrate au coeur du système médiatique français (diplômé de Sciences Po, il est passé de France Inter à Europe 1 puis à Challenges), s'inquiète de deux nouvelles : d'une part, une section FN est en cours de création à Sciences Po Paris (avec, accrochez vous, des anciens UMP, des anciens PS et des anciens FDG (2), ce qui valide la thèse UMPS que le FN dit critiquer), et, d'autre part, la députée FN Marion Maréchal-Le Pen est attendue à l'université d'été de la Sainte-Baume, une manifestation organisée par le diocèse de Fréjus-Toulon (3), ce qui émeut d'ailleurs l'ensemble de la presse. Notons qu'il y aura également à cette université d'été un député PS et une députée UMP, mais passons. 

Déjà, on peut se demander pourquoi une école comme Sciences Po n'avait pas de section FN. Cet établissement ne forme t-il pas des futurs hauts fonctionnaires, et ne rassemble t-il pas des gens que la politique, au sens large, intéresse ? Comment peut-on penser qu'il puisse exister des énarques extrémistes de gauche ou de droite mais qu'ils n'aient pas de relais à Sciences Po ?
Et comment peut on, également, accepter l'idée que les extrémistes de la gauche de l'extrême gauche (4) soient représentés à Sciences Po, mais pas les extrémistes de droite ? 
Par simple souci de pluralité des idées, il était logique que le Front National s'implante à Sciences Po, tout comme le Front de Gauche (5) y est acclimaté.  
Si on veut dénoncer l'extrémisme, alors dénonçons tous les extrémismes. C'est juste de rappeler la filiation idéologique du FN (encore que les différences sont énormes entre les différents courants du FN) mais n'oublions pas de rappeler également celles du FDG, héritier du communisme. 

Ensuite, c'est franchement comique de voir ce journaliste s'inquiéter de l'impact de discussions tenues dans le cadre d'une réunion organisée par le diocèse de Fréjus-Toulon. 
Actuellement, il y a moins de 5% des français qui fréquentent les églises. Etant donné qu'il y a un peu plus d'un million d'habitants dans le diocèse de Fréjus-Toulon, on peut donc estimer qu'il y a 55 000 personnes qui suivent  Mgr Dominique Rey. Cinquante cinq mille personnes ... whaou ! Et pour la plupart, sans doute au dessus de 50 ans de moyenne d'age. C'est sûr que c'est le diocèse de Fréjus-Toulon qui va faire la différence dans la progression du Front National dans le sud ou ailleurs ...! 
La vérité, c'est que des gens comme Bruno Roger-Petit surestiment largement le poids de l'Eglise, ou alors ils regrettent ce qu'elle est devenue : une religion marginale et ultra minoritaire, et qui n'a plus d'impact sur la France. On ne peut pas en même temps se réjouir du fait que "Oui, le mariage hétéro-normé est mort, et avec lui la famille judéo-chrétienne imposée par l'Eglise-institution au tournant du XIIe siècle" (6) et en même temps dire que l'Eglise a un impact sur quoique ce soit : les catholiques, mais aussi les musulmans et les juifs de la Manif pour Tous n'ont pas pu empêcher le président Hollande de réformer le mariage civil en l'ouvrant aux couples gays. Dès lors, pourquoi se préoccuper de ce que, non pas l'Eglise, mais tel ou tel diocèse, serait amener à dire ou faire ?
Au passage, rappelons quand même que Roger Cukierman , le président du CRIF, a jugé que Marine Le Pen était « irréprochable personnellement ». A t-on accusé les juifs de devenir inquiétants ?

En fait, ce qui fait peur, ce sont les idées derrière l'édito de Bruno Roger-Petit, surtout quand il écrit que l’Eglise et Sciences po sont "deux établissements de la société française qui, par destination, devraient s’opposer au Front national" : l'Eglise catholique n'est pas un parti politique, ni même un établissement qui devrait faire ceci ou cela, c'est juste la communauté de ceux qui pensent que Jésus est mort et ressuscité pour annoncer sa bonne nouvelle. Sciences Po, elle, est une école dépolitisée, de gens prêts à exercer le pouvoir, quel qu’il soit. On le voit bien dans la dépolitisation relative de tous ces Sciences Po/Enarques qui pourraient aussi bien être ministres d'un gouvernement socialiste de gauche que d'un gouvernement socialiste de droite. Quand au concept de "société", comme disait Margaret Thatcher (7) ... Sous ses dehors "progressistes" (exemple :: soutien à la PMA), Bruno Roger-Petit semble en réalité rêver du monde stable, hiérarchisé, cloisonné et identifiable de la France des années 60.

Critiquer les conséquences, c'est bien. S'attaquer aux causes, c'est mieux. Ce n'est pas lutter contre le FN qu'il faudrait, mais contre la prégnance des idées nationalistes et socialistes parmi nos compatriotes. Or, le FN, ce parti ultra étatiste, et ultra socialiste, est le mieux disant en la matière. Bruno Roger Petit a raison de s'inquiéter de la progression du FN, mais il aurait dû noter, dès 2012 voire auparavant, que les thèmes politiques portés par l'UMP, le PS et le Front de Gauche, vont tous dans le même sens : toujours taper sur Bruxelles (y compris le président Hollande !), refuser le fédéralisme européen, dénoncer  le soi-disant"l'ultra libéralisme" (Mélenchon, le Pen, Sarkozy, le PS évidemment), laisser penser que la France et les français ont besoin d'un homme ou d'une femme providentiel(le), etc, et Bruno Roger-Petit n'a jamais été le dernier à chercher, malgré lui peut-être, à laisser croire que le "modèle social français" doit survivre..



OpinionS : La France sous surveillance ? par Lopinionfr


Qu'on le veuille ou non, le FN, qui a son programme économique aligné sur celui du FDG (8), est désormais le meilleur défenseur de ce "modèle social français" et de tous les mensonges électoraux que son maintien imposera de prononcer. Ses succès proviennent de là. Alors qu'il soit représenté à Sciences Po ou que tel ou tel diocèse l'invite, ce n'est rien, ou plus exactement, c'est la conséquence, pas la cause.
Si, demain, par malheur et suite à la surenchère démagogique, le FN arrive au pouvoir, les anciens de Sciences Po ne quitteront pas la France. Ils mettront leurs compétences au service du parti au pouvoir. Quand à l'Eglise, sa crise (notamment des vocations et de la fréquentation) ne sera pas achevée pour autant.

Evidemment, on pourrait s'imaginer un autre futur, un futur libéral fondé sur la vérité des faits et sur l'idée que les français peuvent se passer d'un Etat omniprésent paré de toutes les vertus. La seule alternative aux idées dirigistes, interventionnistes, nationalistes et socialistes portées à divers degrés par quasiment tous les partis politiques français, c'est celle proposée par le Parti Libéral Démocrate. Les journalistes comme Bruno Roger-Petit ont évidemment un peu de mal à l'admettre.



(6) Le Salon Beige Bruno Roger-Petit croit encore au sens de l''Histoire 17 septembre 2012
(7) Margaret Thatcher quotes "there is no such thing as society"
(8) Contrepoints Front national : un programme économique d’extrême gauche 6 décembre 2014

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