Ou bien, réalité des chiffres aidant, la panique gagne Matignon et l'Elysée ?
Car les chiffres, les voici : d'une part, la France a un budget en déficit de 85,6 milliards d'euros en 2014 (2), soit 32% de déficit (86 Mds de déficit /273 Mds de recettes).
Nous nous montrons incapable, depuis le début des années 80, de présenter un budget en équilibre (à la différence de nos voisins et amis allemands (3), dont le budget est en équilibre).
Sur nos 364 milliards d'euros d'argent dépensés en 2014, le ministère de la défense en a consommé 42,2 milliards ,soit 13,8 % du budget général de l’Etat (4).
Est ce que ces 42,2 milliards ont été dépensés entièrement en opérations extérieures (OPEX) de lutte contre le terrorisme ? Bien sur que non. Déjà, il y a 250 000 militaires en France. Mais 2300 d'entre eux sont impliqués dans l'opération Serval (Mali). Les OPEX coûtent d'ailleurs un peu plus d'un milliard d'euros par an.
Evidemment, 1 milliard d'euros, c'est beaucoup trop pour un pays qui vit à crédit. Mais cela ne représente que moins de 2% du déficit total.
En imaginant donc que nos 27 partenaires européens nous donnent 1 ou 2 milliards d'euros, il nous resterait à trouver 84 milliards d'euros pour boucler notre budget.
Est-ce que Manuel Valls va aussi accuser les terroristes de nous pousser à dépenser trop (et mal) en éducation, en santé, en transports en commun, en subventions diverses et variées ?
De plus, quand est-ce que Manuel Valls va cesser d'insulter nos partenaires européens ? Les Belges se sont impliqués dans Serval (5), ainsi que les Allemands (6). Est ce que c'est une bonne méthode de négociation, que d'admonester des participants potentiels ? Est-ce que les Allemands, les Polonais ou les Luxembourgeois se sont plaint du fait que l'armée française ait quitté, sur décision unilatérale de François Hollande, l'Afghanistan et l'ISAF (forces de l'OTAN) ?
Et puis, les mots sont important : "face au terrorisme, l'armée européenne existe, c'est la France". Si il n'y avait pas tous ces morts liés au terrorisme, à Paris, à Copenhague, et maintenant à Tunis, on aurait envie de rire ! Le respect que l'on doit aux personnes décédées nous pousse plutôt à hurler contre l'ineptie d'une telle sentence.
Manuel Valls, premier ministre de la république française, pas forcément sur-éduqué (il n'est titulaire que d'une licence d'histoire) mais suffisamment instruit et informé pour comprendre ce qu'il dit, essaye de nous persuader du fait que contre le terrorisme, il faut une armée, d'une part, et que les interventions militaires françaises effectuées sous couvert de "lutte contre le terrorisme" tiennent lieu et place d'opérations sous bannière Européenne.
Y a t-il besoin d'être un expert militaire formé à Saint Cyr pour comprendre que face à un Kouachy ou un Coulibaly qui font un carnage en région parisienne, équipés d'armes qui se négocient quelques centaines d'euros en banlieue, l'armée française, ses Rafale, son porte avion, ses bombes nucléaires, son état major, auront vraiment du mal ?
Est-ce que Manuel Valls pourrait au moins avoir la décence de nous dire que la guerre du Mali est menée par la France tout simplement parce que nous, la France, avons des accords de coopération technique ou des accords de défense avec les pays de la région ? Passons sur le fait que cette guerre du Mali est justifiée par une interprétation vraiment plus que limite de l'article 50 de la charte des Nations Unies.
Alors, Manuel Valls nous explique que quand la France intervient au Mali, ou au Liban, ou en Côte d'Ivoire , ou au Tchad, c'est au nom de l'Europe.
La encore, on ne peut que rire devant une telle affirmation. Elle revient à dire que, déjà, les OPEX sont validées par les français. C'est évidemment faux. On attend toujours les débat à l'Assemblée Nationale pour chacune des guerres engagées par le président Hollande, puisque la Constitution de 1958 nous dit :
- "La déclaration de guerre est autorisée par le Parlement.
- Le Gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l'étranger, au plus tard trois jours après le début de l'intervention. Il précise les objectifs poursuivis. Cette information peut donner lieu à un débat qui n'est suivi d'aucun vote.
- Lorsque la durée de l'intervention excède quatre mois, le Gouvernement soumet sa prolongation à l'autorisation du Parlement. Il peut demander à l'Assemblée nationale de décider en dernier ressort."
A défaut d'avoir informé les représentants du peuple français pour chacune de leurs guerres, le président Hollande et Manuel Valls ont-ils au moins informé Federica Mogherini, Haut Représentant de l'Union Européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (chef de la diplomatie européenne), afin de recueillir son aval, pour ne pas dire son approbation ?
Si ce n'est pas le cas, que Manuel Valls ne vienne pas nous dire que l'armée européenne existe, c'est la France. Une armée, c'est par essence un instrument de souveraineté. Une armée européenne doit nécessairement avoir un financement et un commandement fédéral, pas national.
L'armée européenne, les socialistes français de la SFIO l'ont refusé en 1954 (7), et continuent à la refuser aujourd'hui, par leur nationalisme forcené, en totale opposition avec une quelconque option fédérale.
Egalement publié sur Agoravox |
(1) Le Figaro Valls : face au terrorisme, «l'armée européenne existe, c'est la France» 19 mars 2015
(2) Boursorama France-Déficit budgétaire de l'Etat estimé à 85,6 mds en 2014 15 janvier 2015
(3) La Croix Allemagne: équilibre budgétaire de l'Etat pour la 1ère fois depuis 1969 13 janvier 2015
(4) Ministere de la Défense Budget
(5) RTBF Mali: la Belgique retire ses C-130 mais maintient ses hélicoptères 18 février 2013
(6) Deustche Welle German military on Mali mission 23 mars 2013
(7) Le Monde Comment fut rejeté en 1954 le projet d'une Communauté européenne de défense 9 juin 2004
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